Le test génétique non invasif de la trisomie 13, 18 et 21 fœtale

T21: Caryotype d'une fille ayant trois chromosomes 21
Caryotype d’une personne présentant une trisomie 21

Cela fait plusieurs semaines que nous vous en parlons sur ce site [la première publication de cet article date de décembre 2013], un laboratoire français est maintenant en mesure de proposer le test de dépistage prénatal des anomalies chromosomiques : trisomies 13, 18 et 21 et autres aneuploïdies fœtales (= détection des anomalies chromosomiques pendant la grossesse).

Le dépistage prénatal non invasif de la trisomie NE PEUT PAS être réalisé à domicile. Parlez en à votre médecin, il vous aidera pour le prélèvement des échantillons sanguins et leur acheminement jusqu’au laboratoire.

La technologie derrière le test

Dès les premières semaines de grossesse, une prise de sang chez la femme enceinte permet d’analyser les fragments d’ADN foetal circulant dans son sang (ce sont des cellules ADN du fœtus qui sont passées dans la circulation maternelle à travers le placenta). Ces cellules sont éliminées de la circulation maternelle après quelques jours, il ne peut pas rester de cellules d’une grossesse antérieure qui fausseraient le résultat du test.

ADN libre foetal circule dans le sang maternel

La technologie est la même que celle est utilisée pour le test de paternité prénatal non invasif : séquençage à haut débit et analyse bio-informatique.

Les essais cliniques réalisés

Le test génétique non invasif de la trisomie 21 foetale (abrégé en TGNI) vient d’être validé en clinique dans le cadre du protocole de recherche SEHDA (Sequençage à Haut Débit et Aneuploïdies) à l’initiative du laboratoire de biologie médicale spécialisée Cerba.

Les résultats préliminaires de cette validation clinique portant sur plus de 900 patientes à risque de trisomie 21 foetale confirment l’extrême fiabilité de ce test. En France, en 2013, le Laboratoire Cerba a été le premier à avoir déployé ce test en pratique clinique, du prélèvement jusqu’au rendu du résultat. Il y a eu depuis d’autres laboratoires à proposer ce test en France et dans ses pays voisins , vous trouverez les liens vers ces laboratoires sur notre page de comparateur de prix des tests génétiques des trisomies foetales).

Une étude SAFE21 a eu lien en France, financée par le programme de soutien aux techniques innovantes (PSTIC) et porte sur l’examen du sang de 2500 femmes à risque et utilise le test de la société américaine Sequenom (lire plus bas).

En quoi ce test est-il un progrès ?

Diagnostic invasif de la trisomie et autres anomalies par amniocentèse
Diagnostic invasif de la trisomie et autres anomalies par amniocentèse

Depuis 2010, le dépistage de la trisomie 21 repose sur le diagnostic combiné du premier trimestre (DPT) : un examen des risques maternels basés sur un dosage de marqueurs sériques dans le sang maternel au premier trimestre de la grossesse, et une mesure échographique de la clarté nucale du fœtus.

Dans le cas des femmes présentant un risque supérieur à 1/250 en raison de leur âge et du résultat du DPT, il était proposé de réaliser un prélèvement invasif tel que la biopsie de villosités choriales ou l’amniocentèse(voir schéma ci-contre), pour vérifier si le fœtus présentait une anomalie chromosomique. Le problème est que ces gestes invasifs faisaient courir un risque de 1% de fausse couches alors que la sensibilité insuffisante du test combiné encourageaient les femmes à pratiquer des gestes invasifs alors que la plupart de leurs foetus étaient normaux. Le taux de faux positifs était entre 4 et 5% pour le dépistage classique DPT.

Le test génétique non invasif est plus précis que le DPT, il affiche une sensibilité et spécificité supérieures à 99%. Le test devrait permettre de réduire le nombre de prélèvements invasifs. Ces résultats sont équivalents avec les résultats affichés depuis quelques mois par les laboratoires américains concurrents (Natera, Sequenom, Verinata et Ariosa) et leurs confrères européens (Biomnis, Gendia, Lifecodexx).

A qui s’adresse le test ?

Le TGNI qui est proposé en France est un test de diagnostic, non pas un dépistage systématique proposé à toutes les femmes enceintes (hélas). Il s’adresse principalement aux femmes faisant partie d’une population à risque car:

  • ayant eu un antécédent de grossesse avec aneuploidie (anomalie chromosomique),
  • présentant un risque ≥ 1/1000 de trisomie 21 foetale (sans hyperclarté nucale, c’est à dire sans anomalie décelable à l’échographie),
  • si l’un des parents présente une translocation robertsonnienne impliquant les chromosomes 13 ou 21.

Stratégie de dépistage de la Trisomie 21 par le laboratoire Cerba

Le test génétique non invasif de la trisomie 21 foetale est-il légal en France ?

Le test a reçu un avis favorable du Comité Consultatif National d’Ethique (CCNE) en avril 2013 et du Collège National des Gynécologues et Obstétriciens Français (CNOGF) en janvier 2013. Le Collège national des gynécologues et obstétriciens (CNGOF) avait saisi le CCNE à ce sujet pour obtenir une application plus rapide de ce test aux femmes à haut risque. Dans un avis publié le 25 avril 2013, le CCNE a estimé que le nouveau test de dépistage prénatal de la trisomie 21 à partir d’un prélèvement de sang maternel ne modifie pas la finalité de la proposition de dépistage tel qu’il est proposé actuellement et constitue même un progrès pour les femmes enceintes. Le CCNE suggère à terme, une extension à toutes les femmes enceintes.

Pour les gynécologues-obstétriciens, ce nouveau dépistage prénatal non invasif aura « une importance considérable en termes de non-malfaisance en diminuant le nombre de prélèvements invasifs (choriocentèses et amniocentèses) qui comportent un risque de fausse couche de l’ordre de 1 %, le collège national CNGOF « souhaite maintenant que la législation et la prise en charge par la solidarité nationale interviennent rapidement.»

L’Ordre des Médecins Français propose de maintenir la procédure de dépistage classique (clarté nucale et marqueurs sanguin) pour toutes les femmes enceintes et recommande la pratique d’un test génétique non invasif avant de réaliser une amniocentèse dès lors que la patiente présente un risque supérieur à 1 sur 250 sans anomalie apparente à l’échographie.

Ce test est également autorisé en Belgique, Suisse et en Allemagne. Les tests de dépistage de la trisomie 13, 18 et 21, le syndrome de Turner et la triploidie qui sont actuellement proposés aux Etats-Unis sont également basés sur la même technologie, ont été recommandés par l’association nationale American College of Obstetricians and Gynecologists (ACOG) et par the Society for Maternal-Fetal Medicine (SMFM) depuis 2012. Ces deux organisations ont recommandé que les parents puissent être accompagnés par leur médecin praticien au cours de ces tests afin de pouvoir faire un choix éclairé.

Le test est-il fiable?

Cela fait un peu plus de 10 ans que l’on a découvert des cellules libres foetales dans la circulation sanguine maternelle dès la 10e semaine de grossesse. Une étude a été publiée en février 2013, qui démontrait que le test prénatal non effractif avec analyse de l’ADN fœtal libre avait permis de détecter davantage de cas de trisomie 21 que le test du premier trimestre ainsi que le dépistage prénatal intégré et ce pour un coût total moindre que les méthodes de dépistage classiques. Cependant cette étude portait sur une population de 4 millions de femmes enceintes ayant un risque important de grossesse aneuploïde: femmes âgées de plus de 35 ans ou ayant un risque trop élevé d’après le résultat du test combiné.

L’étude SAFE21 a été menée en France par l’AP-HP Necker, nous vous en avions parlé en 2013 (cf Le diagnostic prénatal non invasif de la trisomie 21 disponible en France en novembre 2013!). Elle porte sur une population de 2450 femmes ayant un risque augmenté de trisomie 21, situé entre 1/5 et 1/250. L’objectif affiché de l’étude est de « favoriser la diffusion des techniques de Dépistage Prénatal Avancé Non Invasif (DPANI) basé sur l’analyse de l’ADN fœtal circulant et répondre ainsi aux besoins exprimés par les femmes et les soignants, pour améliorer la prise en charge des femmes à risque à l’issue du dépistage combiné du premier trimestre et réduire ainsi le nombre de prélèvements et de fausses couches induites. » L’objectif de l’étude SAFE21 est de mesurer l’efficacité médicale et économique du DPANI ainsi que d’oeuvrer pour l’organisation en réseaux des professionnels concernés par le dépistage prénatal de la trisomie 21 pour permettre l’amélioration de la qualité des pratiques. Ils utilisent le test de la société américaine Sequenom dans le cadre d’un accord de partenariat.

Une nouvelle étude a été publiée en 2015 sur l’efficacité du test « Harmony Prenatal » du laboratoire Ariosa Diagnostics, qui est également basé sur l’ADN foetal libre. Cette étude est plus intéressante, car elle porte sur une population générale de 15800 femmes enceintes qui n’ont pas été choisies en fonction d’un facteur de risque particulier. Le taux de détection de la trisomie étaient de 99,9% pour l’analyse de l’ADN libre foetal et de 95,8% pour le dépistage classique, pour un taux de faux positifs de 0,06% dans le groupe du test de l’ADN libre foetal comparé à 5,4% dans le groupe du test standard. Le test Harmony est disponible en Europe par l’intermédiaire d’un groupement de laboratoires belge, Gendia. Le Conseil National des Gynécologues Obstétriciens de France ainsi que la Haute Autorité de Santé ont tous deux publié en 2017 un avis de recommandation de l’utilisation du test ADN non invasif de dépistage de la trisomie 21. (Lire notre article à ce sujet).

Comment faire le test ?

Si vous pensez faire partie d’une population à risque en raison de votre âge au moment de la grossesse (plus de 38 ans) et au vu des résultats du test combiné du premier trimestre (risque supérieur ou égal à 1/1000), discutez de ce test avec votre gynécologue ou votre praticien, il doit commander le test pour vous, organiser le prélèvement sanguin et son acheminement au laboratoire dans les conditions requises par le laboratoire (même si c’est la patiente qui règle l’intégralité des frais d’analyse).

Prix du TGNI :

Le test semble onéreux à première vue, il faut cependant comparer le coût de ce test génétique au coût total des consultations nécessaires de gynécologie, les analyses biologiques et gestes invasifs éventuels. Le test combiné et l’amniocentèse coûtent à la sécurité sociale et aux mutuelles bien plus que le prix d’un dépistage génétique.

La différence est cependant de taille pour les patientes car le test n’est pas encore remboursé par la sécurité sociale. Certaines compagnies d’assurance privées et mutuelles commencent à prendre en charge partiellement ce dépistage en Allemagne et en Suisse. Renseignez vous avant de commander votre test car les compagnies demandent parfois une entente préalable.

Délais du TGNI:

Les résultats sont disponibles sous un délai de 5 jours ouvrés à compter de la réception des échantillons sanguins, selon les laboratoires. En 2013, il fallait attendre près de deux semaines pour avoir les résultats. Un couple peut être rassuré à partir de la 11e semaine d’aménorrhée lorsque aucune anomalie n’a été détectée par le test génétique lors de la 10e semaine d’aménorrhée.

Lorsque le TGNI a détecté un risque élevé de trisomie, le diagnostic doit être confirmé par une amniocentèse. Le résultat du test de l’alpha-protéine AFP et de la recherche rapide des chromosomes est connu 3 jours après l’amniocentèse, mais il faut compter 2 à 4 semaines pour avoir le résultat de l’examen complet des chromosomes et des investigations biochimiques de l’amniocentèse, car les cellules récupérées dans le liquide amniotique doivent être cultivées en laboratoire. Dans ce cas, le couple devra attendre la 18e semaine d’aménorrhée avant d’être rassuré.

Liens vers les laboratoires proposant aujourd’hui ce test génétique de diagnostic:

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