Une étude vient d’être publiée sur l’illustre New England Journal of Medicine qui prouve que le test génétique non invasif de la trisomie foetale par l’analyse de l’ADN libre foetal (cell-free DNA: cfDNA) est plus efficace que les dépistages actuels avec le test combiné et l’amniocentèse.
La technique de recherche d’aneuploidie foetale (le fait d’avoir plus 26 chromosomes) à partir des cellules libres foetales date de 2011. Cette méthode annonçait un taux de détection de la trisomie 21 (le syndrome de Down) de plus de 99% avec un taux de faux positifs de 0.1% seulement. Cette méthode de dépistage représente une amélioration par rapport au dépistage multimarqueurs traditionnel. En pratique, le recours à ce dépistage pourrait réduire significativement le nombre de procédures diagnostiques.
Plusieurs études de preuve de principe avaient déjà confirmé la haute sensibilité et spécificité du test de détection de la trisomie 21 grâce l’ADN foetal libre circulant, mais la plupart de ces études n’avaient porté que sur des femmes sélectionnées parmi un groupe de grossesses à haut risque, qui avaient accepté de fournir un échantillon sanguin juste avant d’effectuer une procédure invasive comme l’amniocentèse. Il y avait peu de données disponibles sur l’efficacité de ce dépistage sur la population générale de femmes enceintes et sur les femmes ayant un faible facteur de risque.
Cette étude prospective en aveugle, appelée NEXT (Noninvasive Examination of Trisomy), compare la performance du Dépistage combiné du premier trimestre (clarté nucale et marqueurs sériques) et du test génétique des cellules libres foetales (cfDNA), sur une large cohorte de femmes non sélectionnées selon leur profil de risque. L’étude a porté sur le dépistage des trisomies 13, 18 et 21.
Méthodologie
L’étude a été menée entre mars 2012 et avril 2013, sur des femmes âgées de plus de 18 ans, se présentant pour le test du premier trimestre auprès de 35 centres de tests à travers 6 pays. Leur grossesse devaient être mono-foetales, datées entre 10 et 14.3 semaines, ne pas avoir fait l’objet d’une PMA, ne pas avoir d’antécédent familial de cancer ou d’anomalies foetales. Les échantillons sanguins ont été prélevés au même moment pour les deux tests et anonymisés avant les analyses.
- DPNI: les échantillons sanguins ont été placés dans des tubes spéciaux pour ADNcf (de Streck). La recherche d’une trisomie 21 par l’ADN libre foetal a été faite avec le test Harmony Prenatal du laboratoire Ariosa Diagnostics, qui était l’un des sponsors de cette étude.
- DPT: le test du premier trimestre consistait en la détection de la concentration de protéine plasmatique plancentaire de type A (PAPP-A), la fraction bêta libre de l’hormone choriogonadotrophique (-hCG libre), ainsi que la mesure de la clarté nucale ont été effectués par des laboratoires locaux accrédités par le programme » Nuchal Translucency Quality Review », la fondation Fetal Medicine Foundation ou des organismes équivalents locaux. Les laboratoires ont utilisant les algorithmes de risque locaux de selon les normes de pratiques cliniques standards. Pour les besoins de l’étude, l’un des auteur a également utilisé un algorithme pour recalculer les multiples médians du serum (MoM) et les mesures de la clarté nucale ainsi que de la longueur de la tête à la croupe. Le dépistage était positif à partir d’un risque au milieu du second trimestre de 1 sur 270 pour la trisomie 21 et au moins 1 sur 150 pour la trisomie 13 et 18, qui sont les seuils utilisés couramment aux Etats-Unis.
Les résultats des deux modes de dépistages ont été envoyés séparément à un centre indépendant de coordinations de données Veristat qui a réalisé les analyses primaires de concordance des résultats.
Résultats pour la recherche de la trisomie 21
Sur les 18,955 femmes inscrites, les résultats de 15,841 étaient disponibles pour l’analyse. L’âge maternel moyen était de 30,7 ans et l’âge gestationnel moyen au moment du test de 12,5 semaines.
Le taux de détection de la trisomie 21 était de:
- 99,9% pour l’ADN libre foetal et de
- 95,8% pour le dépistage classique (P=0,001).
La trisomie 21 a été détectée sur:
- 38/38 femmes (100%; 95% intervalle de confiance [CI]; 90,7 à 100) dans le groupe du test de l’ADN libre foetal comparé à
- 30/38 femmes (78.9%; 95% CI, 62,7 to 90,4) dans le groupe du test standard (P=0,008).
Les taux de faux positifs étaient de:
- 0,06% (95% CI, 0,03 à 0,11) dans le groupe du test de l’ADN libre foetal comparé à
- 5,4% (95% CI, 5,1 à 5,8) dans le groupe du test standard (P<0,001).
La valeur prédictive positive était de:
- 80.9% (95% CI, 66,7 à 90,9) dans le groupe du test de l’ADN libre foetal comparé à
- 3,4% (95% CI, 2,3 à 4,8) dans le groupe du test standard (P<0,001).
Résultats pour la recherche de la trisomie 13 et 18
Enfin, parmi les 15,841 femmes dont les résultats étaient utilisables, il y a eu dix cas de trisomie 18 (syndrome d’Edwards), le taux de détection de la trisomie 18 était de:
- 90% par l’analyse de l’ADN libre, avec 1 diagnostic faussement positif, contre
- 80% par les méthodes de dépistage classiques, avec 49 diagnostics faussement positifs.
Sur les 11,185 femmes testées, il y avait deux foetus porteurs de la trisomie 13 (syndrome de Patau), le taux de détection de la trisomie 13 était de:
- 100% par l’analyse de l’ADN libre avec 1 diagnostic faussement positif
- 50% par le dépistage classique avec 28 diagnostics faussement positifs.
Conclusion de l’étude
Dans cette large étude auprès d’une population de femmes effectuant leur dépistage prénatal de routine, le dépistage de la trisomie 21 par l’analyse de l’ADN libre foetal a prouvé avoir un meilleur taux de détection, un plus faible taux de faux positifs et une meilleur valeur prédictive que le dépistage standard du premier trimestre (clarté nucale et marqueurs sériques).
Cependant, pour les trisomies 13 et 18, le dépistage par l’ADN libre foetal est moins sensible et les techniques classiques sont encore utiles pour détecter d’autres anomalies du foetus.
Note: l’étude a été sponsorisée par Ariosa Diagnostics & Perinatal Quality Foundation. Les données ont été anonymisées et ont été envoyés séparément à un centre indépendant de coordinations de données Veristat.